Argumentaire scientifique

Notre Programme Collectif de Recherche « Arbano, l’Antiquité romaine en Normandie occidentale » (financements du Ministère de la Culture et de la Communication et du Département du Calvados), créé en 2011, est né du constat qu’il était nécessaire de rassembler et trier toutes les informations dispersées sur l’archéologie romaine en Normandie, pour commencer à dresser un tableau du fonctionnement de la société gallo-romaine à l’échelle régionale. Le travail accompli permet maintenant de lire l’espace à l’échelle des sites et des réseaux de sites, même si ce tableau n’est pas encore complet. L’atlas dynamique (SIG) qui rassemble nos données constitue à cette fin un outil évolutif pour mener et approfondir l’analyse des différents réseaux.

Les caractéristiques observées en termes de structuration de l’économie, de réseaux de peuplement et d’organisation des territoires semblent proches de la situation en Bretagne, ex Haute-Normandie et dans le Nord de la France, c'est-à-dire toute la frange nord-ouest de la Gaule. Nous souhaitons, à l’occasion de ce colloque, faire valoir nos résultats, affiner les comparaisons avec ces secteurs limitrophes et élargir l’échelle d’observation aux frontières politiques nord-occidentales de l’Empire (provinces de Belgique, Germanie inférieure et Britannia). L’objectif est alors de comparer les formes d’adaptation à l’influence culturelle et économique romaine dans ces différentes zones de marge, où l’expression de la présence romaine et les formes d’investissement du pouvoir romain sont particuliers. C’est pourquoi une ouverture vers d’autres confins maritimes, la Frise, le Portugal ou le nord-ouest de l’Espagne, ainsi que vers l’Irlande (l’Hibernia), en contact avec le monde romain mais jamais intégrée à l’Empire, nous semblait indispensable.

L’empreinte culturelle de ces espaces est intéressante parce qu’elle se démarque des modèles de sociétés classiquement proposés pour les provinces occidentales. La marque de Rome y est visible en transparence, c'est-à-dire que les grands marqueurs de la romanité (architecture monumentale, urbanisme, voies de communications, systèmes de production de type villa…), bien que présents, s’effacent derrière d’autres formes de cadres de vie, de réseaux économiques et de faciès culturels, souvent héritiers de fonctionnements pré-romains, qui constituent la part majeure des sites archéologiques mis au jour. Loin de témoigner d’une forme d’arriération, les données archéologiques rendent compte à l’inverse du dynamisme économique et culturel de ces secteurs, simplement situés à la marge des modèles de développement romains.

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